Tropique du képone

Dix ans après leur première création commune, Principe de précaution, les chorégraphes Marlène Myrtil et Myriam Soulanges redonnent corps à leur rencontre tout en conservant leur axe de recherche, c’est-à-dire les résonances écologiques qui, déjà en 2014, déclenchèrent leur première collaboration artistique : l’empoisonnement au chlordécone et la pollution des sols aux Antilles. Un duo où la poésie et l’absurde leur servent d’outils de résistance face à un sujet toxique.
Aujourd’hui, c’est par résistance, par lutte et indéniablement par acte politique que les chorégraphes poursuivent leur collaboration sur les problématiques écologiques de leurs pays respectifs et les impacts sur les corps et les imaginaires. L’enjeu de leur démarche artistique se met au service des réalités territoriales de chacune, de la Guadeloupe à la Martinique.
Tropique du Képone est une pièce de danse performative aux manières afrofuturistes. Partant du scandale du chlordécone et de ses conséquences sur les territoires de Martinique et de Guadeloupe, Marlène Myrtil et Myriam Soulanges soulignent l’urgence d’agir et la nécessité de sortir des ordres imposés. Il s’agit, pour elles, de se projeter dans un avenir victorieux afin d’apporter aux luttes du passé et du présent, un mouvement de confiance et de guérison.
Chargées d’un imaginaire tonique et insoumis, les deux artistes évoluent dans un espace de réciprocité, de fondu, de résistance, de reconstruction et de résilience au centre d’un dispositif scénographique marqué par des nuances de bleu. Bleu képone… Ou bleu barbare dans des soulèvements victorieux nourris par l’archive, le récit et la parole.
Au-delà d’une réflexion écologique, cette fiction chorégraphique souligne des écritures de corps fragmentées, distendues et persistantes qui révèlent une mutation héroïque.
"Sortir de la colonialité est le mouvement au cœur de l’esprit afrofuturiste. Ce mouvement induit la fugue, le marronnage, la créolisation... Cette aliénation - hors de la norme - mène à l’épanouissement du corps afrodescendant, au véritable état barbare, à l’état cannibale" Michael Roch